Google est-il grossophobe ?

Après avoir été aussi traumatisée que fâchée des résultats offert par Google lors de nombreuses recherches internet, j’ai décidé de creuser un peu plus la question. C’est pour cette raison que j’ai interviewé Annie Picard afin d’éclaircir un peu la question pour le bénéfice du public. Annie est derrière l’entreprise de rédaction web, SEO et stratégies de marketing organique Slasheuse.co. On lui doit aussi l’excellente balado La ligne diagonale (qui m’a invitée plus tôt cette année !). Elle met de l’avant ses valeurs de gauche à travers son choix de client(e)s et ses publications engagées.


Comment Google et le SEO fonctionnent-ils, en résumé ? Est-ce que c’est à peu près la même chose pour tous les outils de recherche ?

Annie Picard : Personne ne connaît à 100% le fonctionnement exact des moteurs de recherche. Leur algorithme est dissimulé entre mieux que le secret de la Caramilk. Mais ce qu’on sait, c’est que Google prend en compte environ 200 critères pour évaluer les pages qui devraient être présentées comme résultat à une requête d’un.e internaute. 

Évidemment, même en n’ayant pas accès aux secrets de l’algorithme, on peut déduire certaines bonnes pratiques qui favorisent un bon positionnement dans les résultats. Produire un contenu de qualité, qui ne présente pas de problème de temps de téléchargement, qui est indexé par les moteurs de recherches, optimisé pour certains mots-clés, et dont le lien se retrouve sur plusieurs sites de qualité est le résumé le plus court que je pourrais faire. 


Comment la culture – et la grossophobie – ambiante influence-t-elle les résultats, particulièrement au niveau visuel ? Pourquoi, quand on cherche des histoires inspirantes de personnes grosses, on tombe surtout sur des histoires… de perte de poids ? Ou encore quand on cherche des personnes grosses, peu importe avec quel adjectif, les résultats sont horriblement stigmatisants ou grossophobes et associés aux régimes, à la tristesse, à l’inaction, etc. ?

A.P. : Je comprends tellement ce que tu veux dire ! C’est vrai que les résultats présentés sont souvent grossophobes et sexistes. Comme tu l’as dis, c’est la culture ambiante qui en est la cause. Les résultats prouvent qu’il y a un problème de société. 

En effet, l’objectif premier des robots de Google, c’est de se rapprocher du comportement humain et de comprendre les intentions de recherche. Il veut que l’internaute soit satisfait.e du résultat. Que celui-ci représente bien la réponse qu’iel cherchait. 

Et c’est là le problème ! Google va toujours suivre la majorité. Donc, si la majorité clique sur des avant-après de perte de poids après avoir cherché “Fat Inspiration”, par exemple, Google va comprendre que c’est ÇA l’intention de recherche. Que c’est ça que les gens veulent voir. 

On pourrait être porté à dire que Google est grossophobe ou sexiste. Mais le robot ne voit pas les images. Il lit du code, du texte, et il évalue les comportements des utilisateurs et des utilisatrices pour choisir les résultats qu’il présente.


Est-ce que tu crois qu’il y a une façon individuelle que chacun.e peut mettre en place pour essayer de contourner cela…? Question de ne pas être exposé indûment à des contenus qui pourraient être triggering ? Si oui, comment ?

A.P. : J’ai fait quelques tests et pour tomber sur des résultats valorisants et positifs, il faut absolument mettre un adjectif positif dans notre recherche. Par exemple, si je cherche “personne grosse”, les résultats seront hyper stigmatisants. C’est mieux si on cherche “belle personne grosse”, ou qu’on est très précis sur le type d’image qu’on recherche. On pourrait chercher “personne grosse qui fait du sport”, ou “personne grosse en tenue de soirée”, pour ne donner que ces deux exemples. 
Plus on est précis dans notre recherche et qu’on utilise des mots positifs, moins on a de chance de tomber sur du contenu triggering. Mais on n’est jamais à l’abri, malheureusement.


Collectivement, qu’est-ce que tu suggères pour que les recherches sur les personnes grosses dépeintes de façons positives soient efficaces et limitent le contenu grossophobe auquel on est exposé “de force” ?

A.P. : Le SEO (Search Engine Optimisation), c’est en grande partie une game de contenu. Pour apparaître dans les résultats de recherche, il faut produire du contenu de qualité en utilisant les mots-clés pour lesquels on veut se positionner. Donc, plus il y aura de contenu de qualité sur des mots-clés incluant “personnes grosses », « gros » ou « grosse”, plus il y a de chance que ce qui sera présenté comme résultat de recherche sera positif. 

Ça, c’est une partie de la game. C’est ce qu’on pourrait appeler du SEO activism

L’autre partie, c’est de jouer sur les intentions de recherche, c’est-à-dire le contenu qui intéresse les gens. Et ça, ça doit se faire grâce au travail de sensibilisation à la grossophobie que tu fais. 

Les robots imitent les gens. Si on change le comportement des gens, on changera le comportement des robots.


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À propos de l'auteur(trice)

Edith Bernier

Fondatrice de Grossophobie.ca - Infos & référence, conférencière et consultante, elle lutte activement contre la grossophobie depuis 2017. Elle a écrit sur les préoccupations des femmes taille plus en voyage (sur La Backpackeuse taille plus) pendant 6 ans.

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