L’inconfort infinigros

Les personnes très grosses sont encore un tabou important au sein de la société. Souvent reléguées aux derniers rangs des luttes pour la diversité corporelle, les personnes « infinigrosses » sont peu vues ou entendues. Pourtant, leurs réalités et besoins sont bien différents des personnes moins grosses et/ou non-grosses. Il apparaît important d’aborder et de déconstruire l’inconfort de certaines personnes à l’égard de ces personnes considérées « trop grosses ».


Que veut dire « infinigros » ?

Les personnes considérés « infinigrosses » (de l’anglais « infinifat ») font partie du spectre supérieur de l’échelle de la grosseur. Elles peuvent difficilement trouver des vêtements adaptés à leur taille (traditionnellement, 6X ou plus), même dans les magasins spécialisés.  La majorité des appareils médicaux sont peu – ou pas – adaptés pour accommoder leur corps. Les infrastructures (salles de spectacles, lieux de travail, restaurants, etc.) ne sont généralement pas plus prêtes à les accueillir.

Les besoins des personnes « infinigrosses » sont rarement une priorité. Ces personnes constituent un des groupes les plus stigmatisés et marginalisés. Elles sont souvent l’objet de mépris, de dégoût et/ou de pitié par la population. C’est sans doute pourquoi leurs voix sont rarement entendues.


Pourquoi cet inconfort ?

Les corps considérés « atypiques » ont tendance à générer des réactions négatives. On n’a qu’à penser aux personnes avec des malformations, des maladies ou des handicaps visibles. C’est aussi le cas pour les personnes très grosses, qui, historiquement, se sont souvent retrouvées présentées en spectacle, comme des bêtes de foire.  On n’a pas à reculer si loin pour retracer les personnes grosses comme des attractions de cirque.

Et ce concept n’est pas limité au passé. On peut penser à l’émission de télé-réalité My 600-lb Life, en ondes depuis 2012 aux États-Unis. Diffusée sur TLC (The Learning Channel – un nom assez ironique dans ce cas !), le discours qui y est tenu est aussi alarmiste que stigmatisant.

En plus de présenter les corps très gros comme grotesques, ces derniers sont très médicalisés et présentés dans un sentiment d’urgence et de fatalité. La perte de poids extrême est présentée comme la seule issue devant une situation de vie ou de mort.

Cette manipulation télévisuelle pathologise et déshumanise complètement les personnes très grosses. Elles sont réduites à des masses de chair « dégoûtantes » qui doivent être « sauvées » à tout prix, avant de se tuer à petit feu. Les personnes grosses présentées dans ces contextes sont unidimensionnelles ; leur seule volonté est de manger d’importantes quantités de nourritures et elles sont obsédées par leur poids. Les personnes infinigrosses y sont présentées comme des personnes sans contrôle, bourrées de honte et/ou de comportements alimentaires plus extrêmes les uns que les autres. Des situations, qui, même si elles existent dans la « vraie vie », ne sont pas l’apanage de toutes les personnes grosses.

Faut-il se surprendre de l’inconfort suscité, vu cette présentation ?


Quelques pistes de solution….

S’exposer à des corps très gros permet de se sensibiliser et d’apprécier les différences. Plusieurs personnes ont des plateformes intéressantes sur le sujet, notamment The Fat Lip et le compte Instagram @neoqlassicalart. Une simple recherche du mot-clic #infinifat sur Instagram donne accès à une variété de contenus.

Au sein des communautés qui luttent contre la grossophobie, un effort supplémentaire semble primordial afin d’amplifier les voix des personnes les plus grosses. Dans tous les mouvements, il est facile de mettre de côté les personnes plus marginalisées. Il serait négligent d’oublier de mentionner que les personnes dites « small fat » (les moins grosses du spectre de la « grosseur ») ont plus de privilèges.

Tout le monde a sa place

Il ne devrait pas y avoir de valeur morale attachée à l’apparence physique ou au poids. Dans la lutte à la grossophobie, tout le monde est concerné. Que l’on connaisse ou pas des personnes « infinigrosses », il faut donner une voix à ce groupe. C’est en utilisant nos privilèges que leurs demandes seront entendues.


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À propos de l'auteur(trice)

Catherine Labelle

Catherine Labelle est réviseure et rédactrice adjointe de Grossophobie.ca - Infos & référence. Elle est diplômée en travail social (B.A. - Université McGill) et en traductologie (M.A. - Université Concordia).

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