La marque de chaussures américaine Converse a récemment annoncé la sortie de sa collection «Shapes». Cette collection se présente comme étant pour «tous les corps» («A Collection for Every Body»1).
Le site web de Converse explique que la marque «a condensé ses 14 tailles habituelles pour hommes et femmes en 4 tailles inspirées par la silhouette du corps et non son genre. Chaque pièce possède des éléments ajustables qui permettent de créer liberté et mouvement.»2
De belles intentions
Certes, il s’agit d’une intention qui apparaît noble, particulièrement pour les personnes qui se situent dans les zones souvent négligées du spectre de l’expression de genre. Mais peut-on, en se basant uniquement sur le genre et sa fluidité, se targuer qu’on répond aux besoins de TOUS les corps ?
L’objectif de la rubrique Sauf que… ? Faire des études de cas de situations réelles et émanant de la culture populaire qui peuvent envoyer des messages nocifs et stigmatisants sur les personnes grosses. Ces études de cas expliqueront et décortiqueront ces messages et expliqueront en quoi ils sont grossophobes.
Le but n’est pas de faire le procès ou de créer un boycott des personnalités, entreprises ou projets étudiés.
Cet exercice est mené afin de démontrer en quoi une intention noble n’est pas toujours suffisante pour éviter les pièges de la grossophobie socialement acceptable et de ses messages toxiques, non seulement pour les personnes grosses, mais pour l’ensemble de la population.
Sauf que…
Si l’on en croit la définition du dictionnaire Oxford, le mot «every» est «utilisé avec des noms singuliers pour faire référence à tous les membres d’un groupe d’objets ou de personnes».
Restreindre l’éventail des corps et des silhouettes à la simple notion de genre – ou d’expression de genre – est inexact. (Et, à la limite, réducteur.) Le corps d’une personne est tellement plus que ça. Au-delà de son genre, c’est aussi sa taille (ici dans le sens de «grosseur»).
C’est sans compter le fait que parmi «tous les corps», on retrouve aussi de nombreux autres corps marginalisés, dont ceux des personnes handicapées, amputées ou ayant une malformation, par exemple.
Selon la page sur laquelle on navigue, on peut aussi voir la collection décrite comme étant «gender neutral» («unisexe»), une présentation plus honnête.
Tous les corps… surtout ceux qui sont déjà représentés.
De plus, et c’était un peu prévisible, la gamme de taille arrête à l’équivalent de XXL, selon la – cryptique – charte des tailles.
Il est de plus en plus difficile de croire qu’en 2020, on puisse encore parler de «tous les corps» et de vêtements «inspirés par la silhouette» sans tenir compte de la taille de ces corps. Des compagnies aux moyens plus modestes et/ou aux équipes de recherches et développement plus réduites – ou inexistantes – pourraient essayer de s’en sortir en plaidant l’ignorance de bonne foi. Mais on peut difficilement imager qu’une compagnie comme Converse (une filiale de Nike), ait une justification pour une négligence aussi grossière dans le développement d’une collection et de son branding.
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- La compagnie a bel et bien utilisé un espace entre «every» et «body», pour signifier «tous les corps» et non pas «tout le monde» («everybody«)
- Trad. libre de «We condensed the 14 traditional men’s and women’s sizes into four sizes inspired by body shape, not gender. Each piece features adjustable design elements that let you create freedom and movement.»
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