14 juillet : journée internationale des personnes non-binaires. Sans doute la meilleure occasion de rappeler que la perception de la grosseur des personnes peut nuire au plein épanouissement de leur identité.
Encore trop souvent, le poids d’une personne contribue à la présomption de son expression de genre.
C’est l’artiste burlesque et multidisciplinaire Rosie Bourgeoisie (pronom : iel) qui, lors d’un panel auquel nous étions invité(e)s en septembre dernier, m’a permise de constater cette réalité.
La réalité du gras qui «force» le genre.
Au-delà de l’androgynie
Personne non-binaire :
Personne dont l’identité de genre se situe hors de la classification binaire masculin/féminin.
Pour beaucoup, la non-binarité est associée (incorrectement) à l’androgynie et à une représentation qui joue sur les codes traditionnels en matière de genre. Pour des exemples assez connus, on peut penser au chanteur David Bowie pendant sa phase Ziggy Stardust ou encore à Prince. À la chanteuse Annie Lennox, au mannequin Grace Jones ou encore à la peintre Frida Kahlo, au cours de certaines périodes de sa carrière.
Or, les personnes grosses non-binaires AFAB (Assumed/Assigned Female At Birth, soit «présumées femmes à la naissance») ont souvent des courbes et une silhouette traditionnellement associées au genre féminin. On peut penser à des seins plus gros. Ou encore des hanches et des fesses plus généreuses ou une taille plus définie, pour ne nommer que ça.
Lorsqu’on voit quelqu’un avec des seins ou des hanches marqués, beaucoup ont le mauvais réflexe de «féminiser à tort» la personne. On présumera qu’il s’agit d’une femme, sans vraiment se soucier de son identité réelle.
Binding et compression
La compression (binding) est souvent utilisée par les personnes non-binaires dans le but d’affirmer leur identité de genre. Plusieurs y ont recours pour aplatir/amoindrir leur poitrine, par exemple. Cette pratique est souvent utilisée dans un désir de correspondre à une identité de genre qui soit moins «traditionnellement féminine».
Sauf que les gaines et produits de compression sont souvent limités en termes de taille. De plus, au-delà de la taille, il y a des limites à ce que la compression peut accomplir. Une personne ayant une poitrine vraiment volumineuse, même avec le plus extrême des bindings, n’arrivera pas à la dissimuler suffisamment pour se soustraire à la «féminisation à tort». Il y a des limites à ce qu’une personne peut arriver à faire pour camoufler son corps. (Et aussi pour ne pas se mettre volontairement à risque de développer certaines blessures cutanées ou musculo-squelettiques associées à des pratiques de compression non sécuritaires.)
C’est là que le gras peut devenir «genré». Qu’il peut envoyer à tort un message sur l’identité de genre d’une personne. C’est ce qui fait qu’une personne non-binaire avec une grosse poitrine ou des hanches rebondies sera présumée femme par une majorité. Sans poser de question. Sans demander de pronom.
Parce que dans les codes collectifs, des gros seins sont à tort synonymes de «féminité». Même ceux d’une personne grosse et non-binaire qui se bat pour les cacher.
La grosseur ou la distribution du gras corporel d’une personne ne devrait pas faire présumer de son genre. Ça contribue aux oppressions que les personnes grosses ET non-binaires vivent.
«Genrer» le gras, c’est aussi une forme de grossophobie.
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