Les micro-agressions : on en entend souvent parler, mais c’est quoi exactement ? Qu’est-ce que ça mange en hiver ?
Et surtout, quoi faire quand ça nous arrive ?
Il est important de se rappeler que les micro-agressions ne touchent pas seulement les personnes grosses, mais tous les groupes marginalisés, notamment les personnes en situation de handicap, les membres des communautés LGBTQIAP2S+, les différents groupes ethnoculturels, etc.
Une courte définition
D’abord, Le Petit Robert en ligne définit une agression comme suit : «une attaque violente envers une personne».
En général, c’est une notion assez bien comprise, et facile à conceptualiser.
De son côté, le Cambridge Dictionary Online définit les micro-agressions ainsi : «Un simple geste, ou une remarque, perçu(e) comme une insulte ou maltraitance en raison du groupe ethnique, du sexe, etc. même si l’insulte peut être non-intentionnelle et qui, combinée à d’autres gestes ou remarques similaires au fil du temps, créent un tort émotionnel.» (Traduction libre)
- un regard méprisant ou hostile ;
- des gestes inappropriés (ex. imiter grossièrement une personne, faire des avances sexuelles non-sollicitées) ;
- rire d’une autre personne en raison de son apparence physique.
Ce ne sont ici que quelques exemples.
Micro-agression et agression : la même chose?
Non. Une micro-agression fait partie du spectre général des agressions et peut être implicite ou invisible pour les autres. Elle ne ne constitue pas en soi un acte criminel.
La loi définit clairement que certaines agressions sont considérées comme criminelles : agression sexuelle, physique, armée. Une agression est généralement plus facilement observable par les autres.
Aussi, il est important de se rappeler que la micro-agression peut être non-intentionnelle alors qu’une agression l’est rarement.
Une suite ou une accumulation de micro-agressions peut toutefois mener à une agression à ou à la perception d’être agressé(e), si la situation escalade.
Des micro-agressions grossophobes, ça existe ?
Pour qu’une micro-agression soit considérée grossophobe, elle doit nécessairement avoir un lien avec le poids et/ou l’alimentation d’une personne. Les personnes grosses vivent de nombreuses micro-agressions au quotidien. On peut même devenir immunisé(e) à certaines lorsqu’elles sont très fréquentes. La violence au quotidien en devient ainsi normalisée.
Voici quelques exemples parmi tant d’autres :
- un commentaire sur l’alimentation d’une personne grosse (Tu te reprends une deuxième assiette? Es-tu sûr d’avoir vraiment faim? As-tu essayé le kéto, ça fonctionne bien pour X et Y) ;
- un commentaire sur la perte / le gain de poids d’une personne ;
- un regard méprisant ou de dégoût envers une personne grosse (lorsqu’elle mange en public ou porte des vêtements considérés »non-flatteurs», par exemple) ;
- émettre un préjugé et/ou un stéréotype envers une personne grosse ou un groupe de personnes grosses ;
- toucher le bourrelet d’une personne sans son consentement ;
- formuler des remarques implicites (notamment sur l’apparence et l’alimentation d’une personne) ;
- encourager une personne grosse dans un centre d’entraînement ou pendant une activité sportive ;
- des représentants de compagnies visant la perte de poids qui sollicitent directement les personnes grosses ;
- insinuer qu’une personne serait mieux si elle était non-grosse.
Autant de situations qui semblent anodines mais qui, lorsque combinées, peuvent prendre une place importante dans la vie des gens. Cela peut générer des sentiments de colère, de tristesse et d’impuissance. Tous ces petits messages qui, ensemble, reflètent à la personne qu’elle est inadéquate dans son corps actuel. Qui peuvent en mener certaines à prendre des mesures drastiques face à leur alimentation et leur corps, notamment la privation alimentaire et l’exercice excessif. Cela peut aussi déclencher une phase aiguë d’un trouble alimentaire et/ou une perception déformée de son image corporelle.
Quoi faire si ça se produit ?
Si on est une personne grosse :
- En parler à une personne de confiance/ un(e) allié(e). Savoir qu’on n’est pas seul(e) dans une situation peut faire toute la différence.
- Souligner la situation. Avec des personnes de confiance, il ne faut pas hésiter à nommer certains comportements ou commentaires qui font du mal et pourquoi. La personne peut le faire de façon non-intentionnelle.
- Sensibiliser son entourage et/ou les orienter vers notre site web. Notre page C’est quoi, la grossophobie ? est un excellent outil.
- Quitter/ignorer la situation. Particulièrement dans un environnement hostile ou lorsqu’on ne se sent pas en sécurité.
Si on est un(e) allié(e) :
On se sent parfois impuissant(e) en tant qu’allié(e) dans ces situations où on n’est pas sûr(e) si on a le droit de prendre la parole. Toutefois, les personnes non-grosses et les allié(e)s sont des personnes précieuses dans la lutte à la grossophobie. Voici quelques pistes possibles pour bien utiliser votre privilège.
- Discuter avec les personnes grosses dans son entourage afin de prendre conscience de leurs expériences personnelles et de corriger ses comportements au besoin.
- Témoin d’une situation grossophobe ? Il est toujours pertinent de dénoncer (s’il est possible de le faire dans un climat sécuritaire). Aussi, offrir un soutien en privé ou un espace sécuritaire à la personne ciblée est également très approprié.
- Écouter
,et ne pas minimiser les propos d’une personne qui se confie. Ce n’est pas le moment de jouer l’avocat du diable, à moins que la personne ne le demande. - Sensibiliser son entourage. Il ne faut pas hésiter à aider son entourage à reconnaître ses préjugés et ses paroles blessantes en lien avec la grossophobie.
- Prendre la parole. Outre la dénonciation, les personnes non-grosses sont toujours bienvenues à contribuer à la discussion de façon positive, notamment en partageant des études et des articles luttant contre la grossophobie. Exposer son entourage en mettant de l’avant des artistes/modèles ayant des corps atypiques peut aussi être une façon pertinente de déconstruire les préjugés.
Ça reste complexe…
Les micro-agressions se situent tant dans la perception de l’autre que dans sa propre perception du monde. Cette liste de stratégies et ces définitions est loin d’être exhaustive. Bien qu’on ait essayé de les rendre accessibles et simples, la réalité est beaucoup plus complexe.
Une personne qui vit constamment des micro-agressions va nécessairement les percevoir différemment qu’une personne qui n’en reçoit peu ou pas. Dans certains cas, la réaction d’une personne peut sembler exagérée, mais les circonstances entourant la situation, par exemple l’historique entre deux personnes et beaucoup d’autres facteurs, peuvent exacerber un commentaire ou un geste qui semblent anodins, à première vue.
Faire preuve de compassion et d’écoute envers la personne qui souffre demeure, et doit toujours être, l’essentiel.
Merci d’exister! Je ne suis pas seule.